Sur le sujet des PFAS, on commence à bien le voir, la France est loin de mener par l’exemple.

En l’an 2000, l’Union européenne, le Parlement européen et le Conseil adoptent la directive-cadre sur l’eau (DCE). Elle établit un cadre pour une politique globale communautaire dans le domaine de l’eau.

C’est l’élément majeur de la réglementation européenne concernant la protection des ressources en eaux de surface.

Cette directive vise à prévenir et réduire la pollution de l’eau, promouvoir son utilisation durable, protéger l’environnement, améliorer l’état des écosystèmes aquatiques (zones humides) et atténuer les effets des inondations et des sécheresses.

La DCE s’est, en partie, inspirée de lois françaises relatives à la gestion de l’eau.

 

Ensuite arrive notre loi sur l’eau et les milieux aquatiques (Lema) du est la loi française ayant pour fonction de transposer en droit français la DCE, afin d’arriver aux objectifs qu’elle a posé. Notamment :

  • le bon état des eaux d’ici 2015 (raté) ;
  • l’amélioration des conditions d’accès à l’eau pour tous ; (encore raté)
  • plus de transparence au fonctionnement du service public de l’eau ; (toujours raté)

Cette loi française détaille notamment les moyens à mettre en œuvre pour atteindre ces objectifs. Parmi ces moyens, on trouve la création d’un fonds de garantie visant à couvrir les dommages imprévisibles pour les terres agricoles liés à l’épandage de boues d’épuration !

Ce fonds a pour but explicite d’indemniser les préjudices subis par les exploitants agricoles et les propriétaires des terres agricoles et forestières dans les cas où ces terres deviendraient impropres à leur exploitation suite à un risque sanitaire ou un dommage écologique lié à l’épandage. La gestion comptable et financière du fonds est assurée par la Caisse centrale de réassurance, et il est financé par une taxe annuelle due par les producteurs de boues

Le hic, donc, c’est que ces boues contiennent beaucoup de molécules qui posent d’énormes problèmes si elles se retrouvent dans les sols et dans l’eau. Au choix : médicaments, hormones de synthèse, pathogènes, métaux lourds, pesticides, et, donc, PFAS.

 

La France détourne le regard

Donc, on sait, en France, au moins depuis 2006, que l’épandage des boues de stations d’épuration est risqué. Sinon, pourquoi créer un fonds d’indemnisation ?

Néanmoins, comme on l’a vu dans les Ardennes ou dans les Vosges, les épandages de ces boues sur les terres agricoles sont restés monnaie courante, validés sans difficultés par les préfectures de tout le pays.

Parenthèse : l’exploitation des boues de stations d’épuration vient d’une logique d’optimisation des profits. En « valorisant » leurs déchets, les industriels évitent d’avoir à changer leurs pratiques (cesser d’utiliser des substances nocives) ou à trop investir pour retraiter leurs rejets dangereux. A son tour, l’Etat valide cette pratique afin d’écouler les grandes quantités de boues qui sortent des stations, qu’elles soient d’origines urbaines ou industrielles.

 

Même si, pour ces derniers, l’Etat peut feindre d’avoir ignoré en bonne foi le problème jusqu’à récemment, (même si la connaissance de la nocivité des PFAS ne datent pas d’hier, voir ICI), force est de constater que le principe de précaution face à toutes les autres substances ne pesait pas assez lourd dans la balance économique.

 

La Suisse donne l’exemple

Dans certains pays, décision a été prise de longue date pour ne plus épandre ces boues. Nos voisins suisses ont arrêté depuis 2003 ! D’abord interdit sur les surfaces maraîchères et fourragères, l’épandage a progressivement cessé partout en 2006.

On trouve de nombreux supports d’explication de cette décision de la Suisse, qui fait justement valoir le principe de précaution.

Suite aux révélations des pollutions aux PFAS, dans les Vosges et ailleurs, il reste à voir quel chemin prendra la France sur le sujet, que ce soit sur les procédés à mettre en place pour que les pollutions s’arrêtent, ou sur la désignation des responsables de cette situation.

 

 
Elise Goisset

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